Alcool – Accise – Compensation interdite entre produits manquants et produits excédents de références différentes

Un opérateur ne peut pas procéder à la compensation entre produits manquants et produits excédents s'ils relèvent de références différentes bien qu'elles soient taxées de manière identique dans la même catégorie fiscale.

Référence : Cour de cassation, chambre commerciale, 24 janvier 2024, n° 21-19.998 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000049053188?init=true&page=1&query=21-19.998&searchField=ALL&tab_selection=all

Contentieux douanier civil

Un opérateur ne peut pas procéder à la compensation entre produits manquants et produits excédents s’ils relèvent de références différentes bien qu’elles soient taxées de manière identique dans la même catégorie fiscale.

Compensation entre références différentes

La société Duty Free Associates (DFA) achète des produits alcooliques et du tabac qu’elle détient, en tant qu’entrepositaire agréé, en suspension de droits d’accise.

A la suite d’un contrôle de l’entrepôt de la société DFA, l’Administration des douanes a constaté que des produits manquants avaient été compensés avec des excédents de références différentes.

L’Administration des douanes avait, en conséquence, procédé à des redressements de droits d’accise en considérant que les compensations effectuées avaient eu pour effet de minorer le montant desdits droits.

L’opérateur opposait que la comptabilité – matières accises ne doit pas être tenue par référence de produits mais par tarif d’imposition. Par conséquent, la compensation était, selon lui, possible entre produits de références différentes lorsqu’elles relèvent du même tarif d’imposition.

Replacement de produits en suspension d’accise

La société de duty free soutenait également, que dans le système de remboursement/compensation d’accises prévu en cas de replacement de produits en acquittés dans un entrepôt en suspension, les dispositions règlementaires n’excluent pas qu’un entrepositaire agréé puisse établir la déclaration de quantités correspondante en effectuant une compensation entre produits manquants et produits excédents de même nature dès lors qu’ils appartiennent à une même catégorie fiscale et qu’ils sont soumis au même taux d’imposition, même si ces produits relèvent de références différentes.

Une décision critiquable

La Cour de cassation balaie l’argument dans les termes suivants :

15. Selon l’article 302 D, I, 1, 2° bis, du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021, l’impôt est exigible lors de la constatation de manquants. Sont considérés comme manquants les produits soumis à accise placés sous un régime de suspension de droits, autres que ceux détruits ou perdus en cours de fabrication, de transformation ou de stockage, qui ne peuvent être présentés aux services des douanes et droits indirects alors qu’ils figurent dans la comptabilité matières tenue par l’entrepositaire agréé ou qu’ils auraient dû figurer dans celle-ci.

16. Aucune disposition législative ou réglementaire n’autorise les entrepositaires agréés à procéder, dans leur comptabilité matières et leur déclaration d’imposition, à une compensation entre produits manquants et produits excédents de références différentes, même si ces produits appartiennent à une même catégorie fiscale ou relèvent du même taux d’imposition.”

L’argument est spécieux. Certes, aucune disposition légale n’autorise expressément la compensation. Cependant, l’esprit de la loi le permet : la législation et la règlementation l’autorisent implicitement dans la mesure où la comptabilité – matières, à la base de la définition des manquants, ne se tient pas par référence de produit mais par tarif et catégorie de produit.

En effet, notamment, le VII de l’article 286 J de l’Annexe II au Code général des impôts dispose toujours (dans sa version en vigueur depuis le 8 juin 2019) :

VII. – Sans que cela fasse obstacle aux dispositions de l’article 70 de l’annexe I au code général des impôts, la comptabilité matières est tenue :

Par tarif d’imposition, en volume d’alcool pur et en volume effectif, pour les alcools et les produits alcooligènes mentionnés à l’article 338 du code général des impôts, sous réserve des dispositions relatives aux comptes d’âge ou de vieillissement prévus par les textes réglementaires en vigueur et les règlements des organismes interprofessionnels ;

Par tarif d’imposition, en volume effectif, par couleur et par appellation d’origine ou dénomination pour les produits intermédiaires et les produits mentionnés à l’article 438 dudit code, sous réserve des règlements ou accords interprofessionnels prévus notamment en application des articles L. 632-1 à L. 632-7 du code rural et de la pêche maritime ;

Par tarif d’imposition, en volume effectif, par degré alcoométrique, pour les bières ;

4° Selon les règles fixées par la réglementation communautaire, notamment par le règlement (CE) n° 436/2009 précité, pour les produits vitivinicoles autres que le vin ;

Par tarif d’imposition, par unité de produits ou en grammes, selon le cas, pour les produits mentionnés à l’article 575 A du code général des impôts ; [tabacs]

6° Pour les produits qui ne sont pas soumis aux droits mentionnés au deuxième alinéa de l’article 302 B du code général des impôts, par nature de produits exclusivement ;”.

René Ledru – Avocat

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